Ni l’admission à J0 ni la sortie ultra-précoce ne résument la RAC
Nous sommes de plus en plus sollicités par les collègues et les agences de santé concernant l’organisation de l’admission le jour de la chirurgie et la sortie précoce.
La faisabilité de l’admission le jour même de l’intervention (admission J0) a été montrée dans des études datant de plus de 10 ans en chirurgie cardio-vasculaire [1,2]. L’utilité de l’admission J0 est évidente sur le plan médico-économique à la condition de bien sélectionner les patients pouvant faire l’objet de cette mesure [1-3]. Cette sélection obéit pratiquement aux mêmes règles que celles de la chirurgie ambulatoire (contraintes organisationnelles strictes) [4]. L’arrivée au bloc opératoire debout est une mesure toujours, mais non exclusivement, associée à l’admission J0. Au même titre que l’admission J0, le but du patient debout ou « patient 3D » (Debout-Digne-Détendu) est de démythifier l’acte opératoire (même majeur) et apporter une touche d’humanité à la prise en charge [5,6]. Il est évident que dans certains cas ni l’admission J0 ni le patient debout ne sont possibles. Il est évident aussi que ces mesures préopératoires immédiates ont un effet bénéfique sur l’anxiété des patients et leur qualité de vie.
Le danger réside dans le fait que les soignants fassent l’amalgame avec la chirurgie ambulatoire et considèrent que cette phase (organisationnelle) de la prise en charge est essentielle, en négligeant les autres mesures techniques de la RAC (jeûne préopératoire limité, absence de prémédication, toutes les mesures peropératoires de chirurgie mini-invasive, la chasse aux tuyaux, la prévention des nausées et vomissements postopératoires, l’analgésie multimodale, et les mesures de récupération postopératoire avec la réalimentation et le lever précoces, etc). Nous devons tous considérer que, même utiles pour les patients, l’admission J0 et le patient debout ne sont que des mesures associées à la RAC et ne résument en aucun cas la prise en charge globale.
De la même manière, la sortie précoce de l’établissement n’est que la résultante d’un chemin clinique optimal, d’une meilleure convalescence, et de la réduction des complications postopératoires. Certains pensent, à tort, que la RAC est synonyme de réduction de la durée d’hospitalisation et qu’une durée d’hospitalisation postopératoire dépassant un certain nombre de jour est un échec de la RAC [7]. Par définition, la RAC est synonyme de chemin clinique + participation active du patient + esprit d’équipe. La réduction de la morbidité et l’amélioration de la récupération postopératoire et de la convalescence en sont les principaux bénéfices. La réduction de la durée de séjour (avant et après la chirurgie) en est le deuxième marqueur.
En conclusion, l’admission J0 et le patient debout ne résument pas la RAC, la durée d’hospitalisation courte non plus. Ce sont des mesures ou des critères associés au chemin clinique global qui est une bonne médecine (fondée sur les meilleures preuves) dans un bon état d’esprit (d’équipe).
Karem Slim, Président de GRACE
Références
- Arom KV et al. Ann Thorac Surg 1996;61:1136-40.
- Calligaro KD et al. J Vasc Surg1997;25:141-4.
- Silvay G et al. J Anesth 2016;30:444-8.
- https://www.has-sante.fr/jcms/c_1241930/fr/ensemble-pour-le-developpement-de-la-chirurgie-ambulatoire
- Graw E et al. Interbloc 2018;37:175-7.
- Keegan-Doody M. Br J Perioper Nurs 2005;15:529-31.
- Smart NJ et al. Colorectal Dis 2012;14:e727-34.